Estimer la rentabilité de sa résidence principale

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photo de notre première résidence principale
photo de notre première résidence principale

En toute rigueur, la résidence principale est un actif qui ne rapporte rien, il peut donc sembler étrange de vouloir calculer sa rentabilité.

Elle ne rapporte rien au sens où le capital qui y est immobilisé ne génère aucun revenu supplémentaire.

J’exclus ici les cas particuliers comme la location d’une chambre meublée ou d’un studio à entrée indépendante, ou la monétisation d’un espace publicitaire par exemple, qui dans la plupart des cas, ne génèrent qu’un revenu modeste par rapport au coût d’entretien d’une résidence principale.

 

Acheter ou louer ?

Certains jusqu’au-boutistes prétendent que l’acquisition de la résidence principale n’est pas un investissement mais plutôt une dépense.

Il est vrai que si on raisonne froidement en terme purement financier, on peut parfois regretter d’immobiliser tant de capital pour se loger.

On peut faire pas mal de calculs savants pour comparer la situation financière du locataire et du propriétaire en cours d’acquisition. Malgré le titre de ce billet, Je ne vais pas me lancer dans ce genre de calculs risqués aux paramètres multiples et incertains.

 

Je pense que l’achat, ou non, de sa résidence principale est avant tout une affaire de psychologie et de situation professionnelle.

En ce qui nous concerne, nous préférons vivre dans nos propres murs. C’est une situation plus rassurante que d’être à la merci d’une fin de bail. Par ailleurs, nous avons la chance d’avoir une situation professionnelle géographiquement stable.

Enfin, dernier argument : être propriétaire protège contre une toujours possible chute brutale de ses revenus.

 

L’alternative entre acheter et rester en location ne s’est donc jamais posée pour nous, et je pense que nous sommes un échantillon représentatif de la population française.

J’en veux pour preuve les chiffres de la dernière enquête de l’INSEE sur le Patrimoine National dans laquelle on apprend que l’immobilier représentait encore 68 % des biens des ménages en France.

C’est sans doute le résultat de la longue évolution de notre inconscient collectif : la France a muté en l’espace d’un siècle d’un peuple de propriétaires terriens vers un peuple de propriétaires immobiliers.

 

Calculer la rentabilité de sa résidence principale

Même si, pour la majorité de ceux qui peuvent se le permettre, acquérir sa résidence principale est donc une évidence, je n’ai jamais vu de calcul de rentabilité d’une résidence principale. C’est quand même très étonnant quand on voit le poids global de l’immobilier dans le patrimoine des ménages, et quand on sait que la résidence principale en représente l’écrasante majorité.

 

L’expression « Rentabilité de la résidence principale » peut sembler surprenante. Puisque la résidence principale ne rapporte rien, sauf exceptions mentionnées plus haut, elle ne peut pas être « rentable ».

C’est inexact, car la valeur du capital immobilier varie dans le temps. Grosso modo, l’immobilier sur le très long terme suit l’évolution de la progression des revenus des ménages en France comme l’attestent les études de Jacques Friggit.

Si vous suivez l’actualité de l’immobilier, vous devez savoir que nous sommes sortis par le haut du fameux tunnel de Friggit autour de l’année 1998, avec à la clé un doublement du prix de l’immobilier en France sur la décennie qui a suivi.

Si vous avez réalisé des opérations d’achat-revente sur cette période vous avez probablement fait des plus-value confortables, même sans être un gourou de l’immobilier.

 

Quid de la résidence principale ? Si, comme nous, votre résidence principale représente votre seul bien immobilier, il est quand même possible que vous vous soyez enrichis via l’immobilier sur cette période.

En effet, si la valeur de votre résidence principale a progressé, vous vous êtes enrichis de la différence entre sa valeur actuelle et sa valeur d’acquisition.

Cette différence représente le profit brut de l’opération. Bien sûr, c’est un profit virtuel tant que la résidence principale n’est pas revendue (une plus-value latente dirait un boursicoteur), mail il n’empêche que comptablement votre patrimoine a augmenté sur la période.

 

Attention cependant, ce profit brut est largement amputé des différentes charges qui grèvent le propriétaire immobilier en général : les taxes foncières, les intérêts d’emprunt si le bien a été acquis via un crédit, les éventuels frais de syndic, et SURTOUT les frais de travaux et d’entretien.

L’immobilier est en effet un placement original dont le capital s’érode physiquement dans le temps. Les frais d’entretien sont donc incontournables.

Les frais de travaux d’amélioration relèvent plus, il me semble, de la psychologie du propriétaire : « Je suis chez moi, donc je vais améliorer mon cadre vie » ; c’est dans la nature humaine.

 

Un cas réel d’achat-revente: la rentabilité de notre première résidence principale

Trêve de généralités. Je terminerai ce billet comme il est d’usage sur ce blog, par un cas concret issu de notre propre expérience.

Sur la fameuse période du boom immobilier de 1998-2008, ma femme et moi avons acquis successivement 2 résidences principales.

J’ai déjà présenté dans ce billet l’achat de notre première résidence principale acquise en septembre 1998 : un appartement de 98 m2 acheté pour la somme nette (frais inclus) de 109 915,74 € pour être précis.

Cet appartement a été revendu en mai 2007 pour la somme nette vendeur de 190 001,44 . Le prêt affecté à cet achat ayant été soldé en 2002, nous avons récupéré l’intégralité de cette somme.

 

L’avantage de cette opération immobilière est qu’elle est fermée au sens comptable : puisque la vente a eu lieu, nous ne sommes pas tributaires de l’estimation fumeuse d’une agence immobilière pour estimer la rentabilité. De plus, j’archive nos comptes scrupuleusement, je suis donc en mesure de calculer avec précision la rentabilité de cet « investissement ».

 

Un calcul naïf nous donne un profit brut de 190 001,44 – 109 915,74 = 80 085,70 €. Ceci équivaut sur la période de détention à un taux de rentabilité brut annualisé de 6,49 %.

 

Ce calcul est bien sûr faux. Il faut tenir compte des diverses charges afin de calculer le taux de rentabilité net.

 

Sur la période de détention de notre appartement, voici le bilan des charges qui ont amputé la performance brute :

  • 5 509,47 € de taxes foncières

  • 2 045,37 € d’intérêts d’emprunt

  • 2 447,90 € de frais de syndic

  • 9 749,78 € de frais d’entretien et de travaux d’amélioration

soit au total 19 752,61 € de frais en tous genres.

 

A noter que nous sommes tombés dans le piège classique du propriétaire sur la ligne « entretien et travaux ». Outre les entretiens obligatoires, tel le remplacement du ballon d’eau chaude 1 an après notre arrivée (grrr…) nous avons en effet : posé une porte blindée suite au cambriolage d’un voisin, changé les convecteurs pour des radiants, et refait quasiment toute la décoration.

Au total, le profit net de cet « investissement » est donc égal à 60 333,09 €. En reconstituant les flux de trésorerie, le calcul exact donne un taux de rentabilité interne net de 4,84 %.

 

On voit ici une différence spectaculaire entre les taux de rentabilité brut et net. C’est toujours le cas dans l’immobilier, et je crois que c’est encore pire dans l’investissement locatif.

Que pensez-vous de cette manière d’évaluer la rentabilité de sa résidence principale ?

 

7 Responses

  1. Yoshi

    Bonjour,
    Je trouve cette évaluation très pertinente, j’aurais personnellement tendance à ne pas calculer les intérêts d’emprunt:je considère pour ma part qu’ils représentent mon « coût de logement », a mettre en parallèle avec ce que m’am’aurait coûté la location d’un bien équivalent.
    D’un côté j’achète un actif:la résidence principale, de l’autre je paie un équivalent de loyer durant la durée du prêt, via le paiement des intérêts.
    Acheter une RP est un choix, se loger, une nécessité…

  2. Didier-Fabrice

    Bonjour,

    Déjà il faudrait inviter les « jusqu’au-boutistes » à se replonger dans leurs cours d’économie : jamais au grand jamais il n’a été dit que la caractéristique d’un investissement était de produire un revenu (et encore moins un revenu immédiat). La véritable caractéristique c’est l’espoir d’un avantage économique futur.

    Un avantage économique cela peut être une rente, une plus-value (quel est l’abruti qui dirait qu’acheter du Berkshire Hathaway c’est une dépense et pas de l’investissement ? et pourtant Warren Buffet est plutôt pingre quand il s’agit de verser des dividendes…) mais aussi une réduction de coûts.

    Tu as abordé les deux premiers avantages mais tu as oublié le troisième. Si comme le souligne Yoshi se loger est une nécessité en étant propriétaire de ta RP tu ne paies plus de loyer à un propriétaire et c’est une erreur de ne pas tenir compte de cette économie dans un calcul de rentabilité (même si cette économie ne se traduit pas en flux de trésorerie immédiats si tu as acheté ta RP à crédit)
    En effet calculer une rentabilité sert à décider si oui ou non on va effectuer l’investissement mais aussi (et je dirai surtout) à arbitrer entre deux investissements. Et si on ne tiens pas compte de l’économie de loyer on fausse forcément le calcul.

  3. Laurent

    Re-bonjour,

    « Tu as abordé les deux premiers avantages mais tu as oublié le troisième ».

    Très bien vu. Dans ce premier article, j’ai omis l’économie de loyer comme « revenu virtuel » pour calculer la rentabilité.

    Mais comme je m’améliore, je ne l’ai pas oubliée dans ce second opus sur notre R.P. actuelle :
    http://www.nos-finances-personnelles.com/notre-residence-principale-est-elle-un-bon-investissement/

    Errare humanum est, perseverare diabolicum.
    L.

  4. Florian

    Bonjour article intéressant, je suis débutant en immo mais je ne partage pas l’idée de l’achat de la résidence principale, qui ne correspond plus à notre époque, (détails sur cet article http://cash-flo.fr/residence-principale-ou-theorie-confort) mais ma question concerne plutôt le détail du calcul du rendement brut = revenu annuel / capital investi, ce qui donne 8008 / 109915 = 0.072 comment vous arrivez à 6,49 % ? Je me trompe dans mon calcul ?

    • Laurent

      Bonjour,

      « ce qui donne 8008 / 109915 = 0.072 comment vous arrivez à 6,49 % ? Je me trompe dans mon calcul ? »

      Oui je crois que vous confondez rendement et rentabilité annualisée. Et je ne vois pas d’où viennent les 8008 du numérateur de votre calcul.

      A la louche : 80 keuros de profit sur 109 keuros de capital initial donnent une rentabilité brute de 73 %. Sur une durée de détention de 9 ans, ceci correspond à une rentabilité annualisée brute de (1+0,73)^(1/9)-1, soit environ 6,3% l’an.

      Je n’ai plus les chiffres exacts qui m’avaient donné le résultat de 6,49%. J’avais probablement du tenir compte de la durée de détention exacte comprise entre 8 et 9 ans, mais l’idée y est.

      L.

      • hellg4stFlorian

        J’ai compté 10 ans : donc 80 085 / 10 = 8008 pour avoir le gain par année, ensuite j’ai calculé le rendement : (gain / capital investi ) x 100 = 7.3% en renta BRUT sur une année. Donc mon erreur vient du fait que j’ai calculé sur 10 ans au lieux de 9 ans…

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