Les avantages de l’assurance vie en co-adhésion

Classé dans : Assurance Vie | 2

assurance vie en co-adhésion

Dans notre stratégie patrimoniale, l’assurance vie occupe une grande place. Elle pèse en effet un peu moins de 127 k€, soit un bon tiers de notre patrimoine financier qui s’élève actuellement à 355 k€.

Certains utilisent l’assurance vie comme un vecteur d’investissement, d’autres l’utilisent comme une tirelire via les fonds euros de contrats sans frais de certaines banques, ou de certains courtiers en ligne.

C’est tout à fait louable, mais il me semble nécessaire de toujours garder à l’esprit le but principal de l’assurance vie par capitalisation : couvrir l’aléa du décès dans un cadre fiscal attrayant.

Dans un but successoral, l’assurance vie en co-adhésion apparaît encore marginale par rapport à l’assurance vie en adhésion simple. La co-adhésion semble pourtant désormais incontournable pour les couples mariés sous les divers régimes de communauté. C’est en tout cas la stratégie que nous privilégions.

 

Le cadre fiscal général de l’assurance vie en cas de décès

L’assurance vie est un outil de transmission intéressant car elle considérée comme « hors succession ». C’est le fameux article L132-12 du code des assurances auquel s’agrippent désespérément tous les assureurs :

 

« Le capital ou la rente stipulés payables lors du décès de l’assuré à un bénéficiaire déterminé

ou à ses héritiers ne font pas partie de la succession de l’assuré... »

 

L’astuce juridique est que les capitaux sur une assurance vie ne sont plus légalement la propriété du souscripteur mais représentent une créance de l’assureur. L’assureur garantit le remboursement des capitaux, en valeur pour les fonds en euros, ou en unités de comptes pour les contrats multisupports.

 

L’ennui est que ce cadre fiscal privilégié peut se réduire en peau de chagrin si on ne prend pas 2 précautions élémentaires :

  1. Bien rédiger la clause bénéficiaire comme déjà évoqué ici dans ce précédent billet ;

  2. Songer à choisir le type d’adhésion en adéquation avec son régime matrimonial et avec l’origine des fonds.

 

Une rédaction aléatoire de la clause bénéficiaire peut se rattraper facilement, puisque celle-ci est modifiable à tout instant de la vie du contrat.

Par contre, un mauvais choix de type d’adhésion peut s’avérer très pénalisant car il est « quasiment » irréversible : la seule manière de corriger cette erreur est de fermer le contrat, ou à tout le moins de risquer d’annuler son antériorité fiscale si la compagnie d’assurance accepte de changer le type d’adhésion.

 

Les 2 types d’adhésion possibles : simple ou co-adhésion

Il existe 2 types d’adhésion à un contrat d’assurance vie :

  • l’adhésion simple (ou individuelle) ;

  • la co-adhésion (ou adhésion conjointe) pour les couples mariés.

 

La grande majorité des contrats souscrits le sont en adhésion simple ou individuelle : le contrat est enregistré au nom d’une seule personne.

L’adhésion simple est tout à fait adaptée aux célibataires ou aux couples vivant en union libre. Par contre, elle peut se révéler inappropriée sur le plan successoral pour un couple marié.

 

Si vous êtes mariés comme nous après le 1er février 1966 sans contrat de mariage, alors vous êtes sous le régime de la « communauté réduite aux acquêts ».

Dans cette situation, si on alimente des contrats d’assurance vie souscrits en adhésion simple avec des ressources communes au couple, les fonds logés sur ces contrats sont réputés comme des biens communs (des acquêts).

Typiquement, c’est le cas si l’origine des fonds est une épargne régulière en provenance de comptes bancaires (communs ou non), de comptes d’épargne, ou de revenus fonciers d’immeubles détenus en commun, etc.

 

Que se passe-t-il en cas de décès d’un des 2 conjoints ? Depuis la fameuse réponse ministérielle BACQUET du 29 juin 2010 :

 

« …la valeur de rachat des contrats d’assurance-vie souscrits avec des fonds communs fait partie de l’actif
de communauté soumis aux droits de succession dans les conditions de droit commun.
»

 

En clair, les fonds logés sur le contrat d’assurance vie du conjoint survivant seront réintégrés pour moitié dans l’actif successoral.

 

Il y a 2 conséquences fâcheuses à cette situation :

  1. Les héritiers réservataires paient des droits de succession sur la moitié du contrat du conjoint survivant ;

  2. Le conjoint survivant doit partager avec les héritiers la propriété des fonds sur son propre contrat.

 

Le premier point va alourdir les droits de succession des héritiers. Le second point est dommageable pour le survivant puisqu’il se voit privé de la moitié des fonds logés sur son propre contrat (ce qui ne veut pas dire que le contrat est dénoué au décès du premier conjoint, le partage est à entendre au sens fiscal). Bref, personne n’est gagnant.

Comment contourner ce piège ? La réponse est la souscription en co-adhésion, ou adhésion conjointe.

 

Le choix de l’assurance vie en co-adhésion

Comme son nom l’indique le contrat en co-adhésion est souscrit au nom d’un adhérent et du conjoint en tant que co-adhérent. Les 2 adhérents ont exactement les mêmes droits sur le contrat.

L’intérêt principal de la co-adhésion est que l’avantage fiscal de l’assurance vie en cas de décès d’un 2 des adhérents est préservé : la totalité du capital présent sur un contrat en co-adhésion est hors succession, même si l’origine des fonds est commune.

 

Plus précisément, le sort du contrat d’assurance vie suite au premier décès va dépendre du type de co-adhésion choisi. Il en existe deux :

  • la co-adhésion avec dénouement au premier décès : dans ce cas le contrat est clôturé au premier décès et les fonds sont transmis au(x) bénéficiaire(s) intégralement hors succession ;

  • la co-adhésion avec dénouement au second décès : dans ce cas le contrat reste ouvert après le premier décès et le survivant conserve seul tous les droits sur le contrat.

 

L’intérêt principal de la co-adhésion avec dénouement au second décès est de ne pas remettre à zéro l’antériorité fiscale des fonds sur le contrat.

En effet, la fiscalité applicable au dénouement par décès du contrat en co-adhésion est déterminée en fonction de l’âge du conjoint survivant lors des versements.

Rappelons que les versements après 70 ans sur un contrat d’assurances vie (mais pas les produits de ces versements) sont soumis aux droits de succession. Donc, si le conjoint survivant avait moins de 70 ans lors des versements sur la co-adhésion, la fiscalité sera plus avantageuse pour ses bénéficiaires.

Le choix de la co-adhésion avec dénouement au second décès peut notamment être très avantageux pour les couples avec une grande différence d’âge (en pariant sur le fait que le plus âgé décédera le premier !?).

Attention, le régime matrimonial de  communauté universelle doit prévoir dans ce cas l’attribution intégrale des biens au conjoint survivant. Sinon, le fisc  risque de requalifier les capitaux décès en donation indirecte. Toute compagnie d’assurance remplissant ses obligations de conseil devrait refuser le dénouement au second décès dans cette situation.

 

En regard de l’avantage fiscal indéniable, la co-adhésion implique quelques contraintes lors de la vie du contrat : toute opération de gestion (rachat, versement, acompte, etc.), ou toute modification de la clause bénéficiaire, doit être signée par les 2 parties. Par ailleurs la clause bénéficiaire ne pourra être logée dans un testament qui est individuel par nature.

A noter aussi que ce type de contrat est obligatoirement dénoué en cas de divorce.

 

Application pratique à notre propre cas

La ventilation des contrats d’assurance vie souscrits par ma femme et moi au moment où j’écris ces lignes est la suivante :

  • 2 contrats d’assurance vie souscrits en 2002 en adhésion simple auprès de la GMF :

    – un contrat monosupport Compte Libre Croissance d’une valeur de 9 k€ souscrit au nom de mon épouse ;
    – un contrat multisupports Multéo d’une valeur de 14,4 k€ souscrit à mon nom.

  • 1 contrat multisupports Nuances Plus souscrit en 2007 en co-adhésion auprès de la Caisse d’Epargne. Sa valeur est actuellement de 101,6 k€.

 

Je rappelle notre situation : couple à la mi-quarantaine marié sans contrat de mariage après le 1er février 1966 (donc communauté réduite aux acquêts), avec un patrimoine net d’environ 760 k€, dont 355 k€ de patrimoine financier.  Aucune dette. 1 fiston pré-ado comme unique héritier réservataire.

La question est donc de savoir si nos contrats d’assurance vie protègent notre petite famille contre l’aléa du décès.

 

Nos 2 contrats GMF ont une clause bénéficiaire croisée. Le contrat de l’époux survivant tomberait par conséquent sous le coup de la décision BACQUET, avec réintégration de la moitié de ce contrat dans l’actif successoral. Cependant, comme ces 2 contrats GMF ont des valeurs liquidatives relativement modestes, l’impact fiscal resterait très limité.

 

Quel est le plus de notre contrat « Nuances Plus » ? Ce n’est sûrement pas la performance de son fonds euros tout juste dans la moyenne, ni la qualité ou la diversité de ses unités de compte. Non, le plus de ce contrat est tout simplement sa clause de co-adhésion avec dénouement au premier décès.

 

Le contrat ayant été souscrit initialement avec des fonds communs avec une somme initiale relativement importante (45 k€) issue du reliquat de la revente de notre première résidence principale, il nous a été fortement conseillé à l’époque de souscrire en co-adhésion.

bareme droits de succession

Une vision prémonitoire de la Gestion Privée de la Caisse d’Epargne, car ce conseil a été prodigué 3 ans avant la décision ministérielle BACQUET. Décision probablement guidée à l’époque pour éviter tout problème au civil rencontré dans les cas de séparation. Au final, les fonds sur ce contrat sont donc réellement hors succession quel que soit le cas de figure.

Si ce contrat était en adhésion simple (le choix alternatif le plus risqué), il aurait 1 chance sur 2 d’être réintégré pour moitié dans la succession. S’il était scindé en 2 contrats à adhésion simple (le choix alternatif le plus sage), la moitié de l’un des 2 contrats serait automatiquement réintégré à la succession.

Une rapide simulation montre que la co-adhésion fait potentiellement économiser plusieurs milliers d’euros de droits de succession à notre fils.

 

L’idée générale de la co-adhésion avec dénouement au premier décès est de sur-protéger le conjoint survivant en se désignant mutuellement bénéficiaire.

 

Ce choix optimise la transmission au premier décès mais peut s’avérer contre-productif au second décès après l’âge de 70 ans : le remploi des sommes sur un nouveau contrat par le conjoint survivant au-delà de cet âge les réintégrerait automatiquement à la succession.

L’alternative est le démembrement de la clause bénéficiaire, ou la co-adhésion avec dénouement au second décès comme signalée plus haut. Qui sait ce que sera la législation dans le futur si un jour nous approchons cet âge canonique ? C’est un point à surveiller attentivement.

 

Quoi qu’il en soit, l’usage de l’assurance vie en co-adhésion semble, à l’heure qu’il est, incontournable pour les couples mariés sous les divers régimes de communauté.

 

2 Responses

  1. James Langley

    Bonjour Laurent, et merci c’est interessant. J’ai une question: est-ce qu’il y a interet à ouvrir une ass vie en co-adhésion si le couple est marié sous la séparation de diens avec une donation entre époux du dernier vivant? c’est notre cas et j’hésite à ouvrir et alimenter une nouvelle assurance vie en coadhésion, nous en avons mais à nos propres noms actuellement, avec 3 enfants à charge. Merci! James

    • Laurent

      Bonjour James,

      Il y a il me semble contradiction entre régime de séparation de biens et co-adhésion, dont l’esprit est justement de gérer ensemble des fonds communs aux époux.

      Ceci dit, rien ne l’interdit en théorie. Mais à ma connaissance peu de compagnies d’assurance vie acceptent une co-adhésion hors régime de communauté, et celles qui l’acceptent imposent un dénouement au premier décès.

      Je crois que les compagnies d’assurance vie sont assez réticentes sur le sujet eu égard à certaines difficultés sur la répartition du versement des primes (nécessairement issues de fonds propres) et sur la répartition d’éventuels retraits partiels pendant la vie du contrat. On peut très bien imaginer une stratégie de retraits partiels au profit d’un seul des époux que le fisc pourrait requalifier comme une donation déguisée (les donations entre époux de son vivant ne sont pas exonérées).

      L.

Laisser un commentaire