Les fonds euros sont confrontés depuis maintenant plusieurs années à une conjoncture de taux d’intérêts extrêmement défavorable.
Non seulement les taux sont bas, mais le profil de risque des débiteurs traditionnels des compagnies d’assurance vie augmente. La dette souveraine a explosé depuis la crise de 2008-2009 et certains pays en zone euro présentent désormais un profil de risque supérieur à des entreprises de signature moyenne.
Malgré cet environnement hostile, les français ont continué à faire une confiance aveugle dans les fonds euros : depuis 2009 ils ont ajouté au « pot » des fonds euros environ 300 milliards d’euros, portant à fin 2015 les provisions mathématiques totales sur ces supports à la somme astronomique de 1 393 milliards d’euros.
Cette frénésie d’épargne ininterrompue sur un support plébiscité de longue date est-elle toujours raisonnable ?
Les fonds euros sont en théorie garantis à tout moment par les compagnies d’assurance. Mais, est-ce vraiment le cas ?
Nous voyons 2 issues possibles à la situation actuelle :
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Dans un scénario « soft » à la Japonaise où les taux resteraient bas sur une période prolongée, nous pensons que le rendement des fonds euros finira par tendre vers zéro. Le rythme de décrue des rendements devrait accélérer au fur et à mesure que des bons du trésor à taux quasi-nul entrent dans l’actif général des compagnies d’assurance.
Ce scénario ne devrait pas menacer la garantie en capital des fonds euros, ni leur liquidité à tout instant.
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A contrario, dans un scénario catastrophe où les taux repartiraient brusquement à la hausse, le modèle du fonds euros pourrait être remis en question.
En effet, si les compagnies d’assurance sont confrontées à une demande massive de retraits sur les fonds euros alors qu’elles sont en situation de moins-value latente sur une partie significative de leur portefeuille obligataire, alors un krach systémique n’est pas impossible.
Nous pensons cependant que la probabilité d’un tel événement est assez faible. La clientèle classique de l’assurance vie est plutôt captive, notamment pour des raisons fiscales. Difficile d’imaginer cette clientèle se ruer auprès de leur assureur pour retirer ou arbitrer tout ou partie de leurs chers fonds euros.
Face à ces risques, certaines compagnies d’assurance vie ont néanmoins commencé à prendre leurs précautions. C’est le cas notamment de Spirica et Apicil qui restreignent désormais les nouvelles souscriptions sur leurs fonds euros.
Le législateur, au travers la loi Sapin 2, a également anticipé le problème. Il autorise désormais le HCSF (Haut Conseil de Stabilité Financière) à contraindre un ensemble d’assureurs à suspendre momentanément la liquidité de leurs fonds euros, ou à réduire leur rendement.
Si vous suivez le blog, vous savez que notre scénario privilégié est celui à la Japonaise : des taux bas pour longtemps. Cependant, certains signes de marché depuis quelques semaines vont dans le sens opposé : les taux longs aux US remontent, le cours des matières premières se redresse, et des poussées inflationnistes réapparaissent.
Tous ceux qui ont un montant significatif investi en fonds euros, et nous sommes toujours à titre personnel dans le troupeau au moment où j’écris ces lignes, devraient impérativement suivre ces derniers rebondissements.
Si la probabilité de défaut nous semble faible, il y a bien un risque qu’il convient d’évaluer. On ne sait jamais. Ce serait dommage de subir le sort de la jeune fille de bonne famille dans la chanson de Dylan, laquelle finit en mendiant dans la rue « Like a Rolling Stone ».